Taxation des profits de l’IA : une fausse bonne idée pour la compétitivité française ?

Le débat public concernant la juste contribution fiscale des multinationales est légitime et nécessaire. Toutefois, l'idée émergente de cibler spécifiquement les profits générés par l'intelligence artificielle (IA) mérite une analyse stratégique approfondie, au risque de créer un désavantage compétitif majeur pour l'écosystème français.

# Le risque d'une innovation pénalisée

La mise en garde récente du prix Nobel d'économie Philippe Aghion est sans équivoque : une fiscalité mal calibrée pourrait nous faire « manquer la révolution de l’IA ». En tant que dirigeants et investisseurs, nous devons mesurer le poids d'un tel avertissement. L'enjeu n'est pas seulement fiscal, il est géopolitique. Une taxation qui freine l'investissement dans l'IA en France ne ferait que renforcer la position dominante des acteurs américains et asiatiques, affaiblissant notre souveraineté technologique à long terme.

# Un contexte fiscal déjà contraignant

Il est crucial de rappeler que la France n'aborde pas ce débat à partir d'une page blanche. Comme le souligne le Baromètre européen des impôts de production 2024, notre pays se caractérise déjà par une fiscalité sur la production parmi les plus élevées d'Europe. Cette pression fiscale est souvent décrite comme un frein structurel à la compétitivité de nos entreprises. Instaurer une nouvelle taxe sectorielle sur l'IA irait à l'encontre des efforts engagés pour alléger ce fardeau et améliorer l'attractivité du territoire.

# L'impact B2B : des coûts d'adoption en hausse

Pour les entreprises, les conséquences seraient directes. Une taxe sur les profits des fournisseurs de solutions IA serait inévitablement répercutée sur les clients finaux. Le coût d'accès à ces technologies transformatrices augmenterait pour nos PME comme pour nos grands groupes, ralentissant leur modernisation et leur capacité à concurrencer sur le marché mondial. Loin de ne viser que les géants du numérique, une telle mesure pénaliserait l'ensemble du tissu économique français qui cherche à intégrer l'IA pour passer de la théorie à la croissance.

Plutôt que d'instaurer un nouveau prélèvement qui risquerait de provoquer un « choc » pour l'écosystème, à l'image des réactions dans d'autres secteurs face à des projets de taxation ciblée, la véritable stratégie gagnante réside dans la création d'un cadre réglementaire et fiscal stable et incitatif. Attirons les investissements, encourageons la R&D sur notre sol et favorisons l'émergence de champions locaux. C'est en devenant un pôle d'excellence attractif, et non un environnement fiscal punitif, que la France captera durablement la valeur générée par l'intelligence artificielle.

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