Le rapport de l’Autorité de la concurrence publié en juillet 2024 est formel : le monopole de Nvidia sur les accélérateurs IA n’est plus incontesté. Les benchmarks de MLPerf montrent que les puces chinoises (Huawei Ascend, Baidu Kunlun) et européennes (SiPearl Rhea) réduisent l’écart de performance de 15 à 40 % sur les workloads de training et d’inférence.
Pour les DSI et directions stratégiques francophones, cette inflexion du marché n’est pas une simple actualité technologique. C’est un levier puissant de négociation et de souveraineté numérique.
Trois leviers stratégiques à activer dès 2024
1. Diversification des risques
Multiplier les fournisseurs limite l’impact d’un embargo ou d’une pénurie. Les architectures multi-GPU mixtes (Nvidia + alternatives) deviennent techniquement viables grâce aux frameworks open-source matures comme PyTorch 2.2 et ROCm 6.0.
2. Baisse des coûts
La concurrence a déjà entraîné une réduction de 8 à 12 % des prix spot sur les instances GPU européennes (source : 451 Research, Q2 2024). Un contrat cadre annuel peut désormais inclure des clauses de révision à la baisse indexées directement sur les benchmarks MLPerf.
3. Souveraineté technologique
L’auto-hébergement de modèles open-weight (comme Llama 3 ou Mistral Large) sur du matériel non américain réduit l’exposition extraterritoriale au CLOUD Act et renforce la conformité au RGPD (GDPR).
Contexte réglementaire et géopolitique
L’Autorité de la concurrence en France étudie activement la possibilité d’une obligation de licences FRAND (Fair, Reasonable, and Non-Discriminatory) pour les drivers CUDA. Une telle mesure accélérerait significativement l’interopérabilité.
Par ailleurs, des acteurs majeurs comme Alibaba ont présenté, notamment à Viva Technology, leur cluster T-Head basé sur RISC-V, offrant une stack complète sans dépendance américaine directe.
Actions immédiates pour les décideurs
Les entreprises qui saisiront cette fenêtre d’opportunité de 12 à 18 mois pourront réduire de 20 % leur TCO IA tout en renforçant leur souveraineté numérique.
Voici les étapes concrètes à mettre en œuvre :
- Auditer l’inventaire GPU actuel et classifier les workloads par criticité.
- Lancer un proof-of-concept sur une charge non critique avec des cartes Huawei Ascend 910B via un partenaire cloud européen.
- Négocier des clauses de sortie (« exit clause ») de 12 mois maximum dans les contrats Nvidia existants.
- Suivre les travaux de l’Inria sur les patterns de désagrégation mémoire pour optimiser l’utilisation des GPU déjà amortis.
Le statu quo est terminé. Le moment est venu de transformer la fin d’un monopole en avantage concurrentiel mesurable.